Impressionner jusque dans la mort : huit mausolées royaux monumentaux
Pour les dirigeants, imposer une impression de grandeur de leur vivant ne suffit pas : ils doivent laisser des traces qui perdureront, et s’offrir des monuments funéraires à l’égal de leur gloire. Huit exemples de mausolées royaux aux proportions et décors fabuleux, de l’Antiquité à la fin du Moyen Âge.
C’est une question à la fois de communication politique et de spiritualité : au fil de l’histoire, les souverains imposent au paysage urbain des édifices monumentaux qui font étalage de leur puissance, et s’assurent une dernière demeure correspondant à leur rang, et dans laquelle ils peuvent entreposer des richesses qui les accompagneront dans ce qui vient après, selon les diverses religions auxquelles ils appartiennent.
La pyramide de Khéops, 2560 avant J.-C.
On ne la présente plus, mais nous allons le faire quand même. Édifiée sous la IVe dynastie égyptienne sur le plateau de Gizeh, la pyramide-tombeau du pharaon Khéops bat tous les records. Haute de près de 146 mètres à l’époque de sa construction (l’érosion et le temps l’ont un peu raccourcie), sur une base de 230 mètres carrés, elle est constituée d’environ 2,3 millions de blocs de pierre pesant en tout 5 millions de tonnes. Sa construction a duré une vingtaine d’années et les archéologues estiment le nombre d’ouvriers ayant participé au chantier entre 20 000 et 30 000. Résultat de ces deux décennies de prouesses d’ingénierie : la pyramide est considérée comme la première des sept merveilles du monde antique, et est restée le plus haut édifice du monde pendant près de 3800 ans – jusqu’en 1311, où les 160 mètres de la flèche de la cathédrale viennent battre son record. Avoir été dépassée n’a en rien terni l’attractivité de la pyramide de Khéops, qui accueille, aux côtés de ses sœurs, près de 15 millions de visiteurs chaque année.
Pyramide de Khéops et Sphinx, plateau de Gizeh, Égypte | Mantaphoto via Getty Images
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Le mausolée d’Halicarnasse, 350 avant J.-C.
C’est au satrape perse achéménide de Carie, Mausole, devenu roi après avoir pris le contrôle d’une grande partie du sud-ouest de l’Anatolie, que l’on doit le terme « mausolée », qui s’applique dès l’Antiquité aux tombeaux de grande taille. On attribue traditionnellement la commande de l’édifice à la sœur-veuve de Mausole, Artémise ; mais les archéologues estiment qu’il est plus vraisemblable que les travaux aient été commencés du vivant du monarque. Achevé en 350 avant J.-C., le mausolée est à l’époque haut de 45 mètres et orné de nombreuses sculptures. Très admiré de ses cultures contemporaines, il est considéré comme la cinquième des sept merveilles du monde antique. Tombé en ruines au fil des années, ses fondations font l’objet de fouilles archéologiques à partir de 1857.
Maquette du mausolée d'Halicarnasse au musée d’archéologie sous-marine de Bodrum | Wikimedias Commons
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La nécropole et l’armée de terre cuite de Xi’an, 210 avant J.-C.
Un des exemples les plus frappants d’édifice funéraire démesuré est la nécropole du premier empereur de Chine, Qin Shi Huang, achevée vers 210 avant J.-C. Près de 700 000 travailleurs auraient été mobilisés pendant les 38 ans qu’ont duré sa construction. La nécropole dans son ensemble couvre une superficie de 98 km carrés. Elle abrite l’armée la plus célèbre du monde : 8000 soldats, 130 chars tirés par des chevaux et 150 cavaliers… tous réalisés grandeur nature en terre cuite et équipés, à l’époque, de véritables armes. Fabriquées séparément dans des ateliers par des ouvriers et des artisans, les différentes parties des statues sont ensuite assemblées et peintes de couleurs vives. A la découverte de l’armée en 2007, les archéologues identifient une dizaine de visages types sur toute l’armée, donnant vie à des fantassins, cavaliers, conducteurs de char de guerre, lanciers, archers et arbalétriers, généraux, officiers…. Tous bien identifiés et différenciés par l’ajout de détails et d’expressions personnalisés. L’armée de terre cuite qui a accompagné Qui Shi Huang dans la mort est aujourd’hui inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO.
Une partie de l'armée de terre cuite de la nécropole de Xi'an | Wikimedias Commons
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Les mausolées d’Auguste et d’Hadrien, 28 avant J.-C. et 139
Lorsque Auguste rentre de ses campagnes militaires en Orient, il fait ériger un monument colossal, de 90 mètres de diamètre pour 40 de hauteur. Sa forme circulaire, sa taille, sa décoration fastueuse et son sommet conique planté d’arbre le rendent particulièrement visible – d’autant qu’il se trouve sur une rive du Tibre, au nord du Champ de Mars, un espace qui est encore à l’époque peu urbanisé. Deux siècles plus tard, Hadrien fait construire son propre mausolée, sur la rive droite du Tibre, comme un écho à celui de son prédécesseur. Sa construction a duré 9 ans. Finalisé en 139, l’édifice est composé d’une base carrée de 80 mètres de côté sur 15 mètres de hauteur ; d’une rotonde de 21 mètres de haut, abritant un tumulus de terre dans lequel se trouve la chambre funéraire ; une partie carrée au sommet, qui porte le tout à une cinquantaine de mètres de hauteur. Une statue représentant Hadrien menant un quadrige sous les traits d’un dieu solaire y était placée, détail grandiose parmi les riches décorations. Le mausolée d’Hadrien est aujourd’hui le château Saint-Ange, et s’impose toujours dans le paysage romain.
Mausolée d'Auguste, Rome | MumblerJamie, CC BY-SA 2.0 via Wikimedias Commons
Mausolée d'Hadrien, actuel château Saint-Ange, Rome | Wikimedias Commons
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Le Gour Emir de Tamerlan, 1403
A Samarcande, le mausolée de Tamerlan, aussi appelé « Gour Emir », est rapidement devenu le modèle pour toutes les grandes sépultures mogholes. Commandé par le petit-fils de l’émir et achevé de son vivant en 1403, l’ensemble est particulièrement faste, malgré le souhait de Tamerlan d’être enterré sobrement. A l’époque, le complexe du mausolée est composé d’une cour intérieure, de quatre iwan (salle voûtée ouverte sur un côté sur une arche), d’une madrasa (école théologique musulmane), d’une ḵānāqāh (maison des savants) d’une mosquée et de quatre minarets encadrant le tout. Le manque d’entretien et les séismes ont conduit à la dégradation du monument, qui a connu depuis les années 1920 plusieurs phases de restauration. Aujourd’hui, le site se rapproche de l’esprit originel des bâtisseurs : un octaèdre couronné d’une magnifique coupole couverte de carreaux turquoise, d’une hauteur de près de 32 mètres. Le mausolée attire des visiteurs du monde entier.
Gour Emir, Samarcande | Arina Pan via Wikimedia Commons, CC BY-SA 4.0
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Le Taj Mahal, cir. 1648
La beauté du dernier monument funéraire de cette liste est réputée dans le monde entier – peut-être parce qu’il a été construit, une fois n’est pas coutume, par un roi pour une reine et non pour lui-même. A la mort de son épouse Arjumand Bânu Begam, l’empereur moghol Shâh Jahân ordonne l’érection, à Agra, dans le nord de l’Inde, d’un monument exceptionnel : un mausolée de 60 mètres de côté et 74 mètres de hauteur, qui repose sur une plateforme de 96 mètres de côté de 7 mètres de hauteur, et est encadré de quatre minarets s’élevant à 42 mètres. Le chantier aurait mobilisé 22 000 esclaves et maîtres-artisans venus d’Europe et d’Asie. Le Taj Mahal et sa sublime façade de marbre blanc incrustée de gemmes fait partie des sept merveilles du monde moderne et accueille 6 à 8 millions de visiteurs par an.
Taj Mahal, Agra | somchaison via Getty Images
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