Une brève histoire du passeport - Chapitre 2 | Moyen Âge, du sauf-conduit au passeport
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Dans la lignée des systèmes antiques, le sauf-conduit médiéval évolue jusqu’à prendre le nom de passeport. Du XIIe au XVIIIe siècle, il encadre les déplacements à l’intérieur et à l’extérieur du territoire, et se démocratise progressivement. Découvrez le second chapitre de notre brève histoire du passeport !
Et manderent à l'empereur que il voloient à lui parler de pais, mais qu'il eussent sauf-conduit alant et venant
(Et l’on manda à l’empereur qu’ils voulaient venir lui parler de paix, mais qu’ils eussent un sauf-conduit pour aller et venir)
Chanson de Roland, p. 121, XIIIe siècle
Huit etapes de La Chanson de Roland en une image - Simon Marmion — Grandes Chroniques de France, St. Petersburg, Ms. Hermitage. fr. 88: (Niederl. Burgund, Mitte 15. Jh., Exemplar Philipps des Guten), folio. 154v
Le salvus conductus, le sauf-conduit, apparaît au XIIe siècle. C’est dans un premier temps un laisser-passer officiel et pérenne, donné par le roi à ses représentants pour qu’ils puissent voyager sans risque et franchir les frontières en toute sécurité. Il s’agit ainsi d’un privilège accordé à une élite, qui garantit la protection et l’immunité de son porteur. A partir du XIVe siècle, les sauf-conduits se multiplient : ils deviennent temporaires et s’appliquent aux personnes, lieux et laps de temps qu’ils mentionnent. Il faut bien comprendre que ce ne sont pas encore des documents personnels, et que le lien avec l’identité n’est pas encore très marqué : ils concernent le voyageur principal et son groupe (gardes, autres marchands…) ; l’essentiel est de le détenir, c’est cette détention qui offre le privilège du déplacement. Ils peuvent être délivrés par le roi, les seigneurs, les autorités militaire ou religieuses, et s’étendent progressivement à plusieurs catégories de population, comme les marchands. On associe souvent la remise de sauf-conduits à ce corps de métier à l’organisation des foires de Champagne. Ces rassemblements de négociants se tiennent à intervalles réguliers dans plusieurs lieux du comté, certaines ouvertes à tous, d’autres réservées aux professionnels. Les seigneurs du lieu des foires ou des villes sur le chemin des commerçants délivrent alors des documents garantissant le passage sur leurs territoires. Les pèlerins doivent aussi pouvoir présenter, lorsqu’ils voyagent vers les lieux saints, une lettre remise par une autorité religieuse – en général leur prêtre ou leur évêque. Idem pour les étudiants, qui se voient remettre un « testificat », qui prouve qu’ils ne vagabondent pas ; et pour les domestiques, qui doivent se munir d’un certificat émis par leur maître, ou ancien maître, quand ils se déplacent. Avec l’essor des échanges internationaux, le sauf-conduit est aussi remis à des étrangers - marchands ou diplomates en mission. En Bretagne au XVe siècle, par exemple, il donne ainsi le droit aux étrangers d’entrer dans le duché, d’y aller et venir et d’y faire commerce. Le document comporte le nom du concerné, de son navire et la liste des marchandises. Durant les périodes de guerre, les sauf-conduits sont très prisés, rassurant les voyageurs – le document attestent un droit de passage, mais aussi une forme de protection de la part de l’autorité émettrice. Voyager sans document amène le risque d’être considéré comme un vagabond (au Moyen Âge, on oppose les mendiants invalides, qui sont « autorisés » à demander l’aumône, aux mendiants valides, que l’on estime aptes à gagner leur vie, et qu’on considère donc en situation de vagabondage, un délit puni par loi) et d’être emprisonné.
Dans la seconde moitié du XVe siècle, le terme de « sauf-conduit » est progressivement abandonné, pour être remplacé par celui de « passeport » (pour « passer les portes »). Le système mute alors : on passe d’un privilège octroyé à certains individu à une obligation s’imposant graduellement à tous. On émet deux type de passeports hérités des sauf-conduits : le passeport « intérieur », qui permet de se déplacer selon un itinéraire donné au sein du territoire, pour passer par exemple d’un département à un autre ; et le passeport « extérieur », qui concerne les étrangers souhaitant entrer sur le territoire et les Français souhaitant en sortir. Au XVIe siècle, le passeport devient un document personnel – et payant, et continue de se développer dans tous les pays d’Europe. En 1753, en Prusse, le roi Frédéric-Guillaume Ier impose à tous les voyageurs (sauf les « officiels de l’armée » ou « autres personnes de qualité ») d’en être munis : il souhaite éviter les déplacements de population, notamment de paysans et d’artisans qui sont considéré comme de la « richesse » locale, et l’arrivée massive de vagabonds et d’indigents dans les villes. Ces préoccupations sont globalement partagées par tous les dirigeants, ce qui explique l’importance accordée au passeport intérieur. Ce document de voyage se démocratise progressivement jusqu’au XVIIIe siècle, où la Révolution française le remet brièvement en question.
Anna F.
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